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Chaud et humide
5 mai 2014

C'EST TROP LONG ADOPTER? ALORS ACHETEZ LE BÉBÉ!

Il fut un temps où existait une expression au Québec pour décrire la femme enceinte : on disait « elle va acheter ». Aujourd’hui, allons-nous voir apparaître l’expression « elle va vendre »? Le cas Joël Legendre, médiatisé d’une manière qui frôlait l’indécence, soulève la question dans toute son ampleur.

La loi canadienne sur le sujet est on ne peut plus claire : il est interdit à quiconque de vendre ou de louer son corps pour permettre à une autre personne d’avoir un enfant. Dans les faits, le Canada n’interdit pas la GPA (gestation par autrui), mais il en interdit toute forme de commercialisation, ce qui, convenons-en, consiste à « rêver en couleurs »!

Dans les faits, peut-on imaginer une personne normale qui va généreusement prêter son corps pendant neuf mois à un autre couple qui ne peut avoir d’enfant? Pour permettre à ce couple de se perpétuer? Nous savons tous qu’une grossesse n’est pas sans risque, qu’un accouchement peut mal tourner et que, dans certains cas, heureusement de plus en plus rares ici, l’issu peut parfois être tragique. Quelle femme saine d’esprit prendrait un tel risque en sachant que, ensuite, elle devra abandonner l’enfant avec lequel elle a vécu en symbiose pendant neuf mois? Sans doute aucune, à moins d’une amie très proche, très liée, et prête à s’oublier totalement dans ce geste.

Dans le cas de Joël Legendre et de son conjoint, un couple homosexuel qui souhaitait un enfant, ce qui en soi n’a rien d’étonnant, ni encore moins de condamnable, la femme qui s’est prêtée à eux pour ce besoin de procréer n’était pas une amie proche, ni même une connaissance. C’était une femme qui a simplement profité d’une zone floue de la loi pour le faire pour de l’argent. En effet, cette dame s’est vue indemnisée par la Régie de l’assurance maladie du Québec. Un faible montant sans doute, mais une indemnité qu’on pourrait associer à un revenu pouvant être attirant pour une personne démunie.

On voit d’ici les conséquences à long terme : pour des femmes sans-le-sou, sans autres ressources, vendre ainsi son corps pourra devenir une façon de se tirer momentanément d’affaires. Il est certain que ce sera sans intérêt pour toutes celles qui gagnent convenablement leur vie, mais pour une personne que la chance et les circonstances n’ont pas gâtée, c’est une avenue qui s’offrira. En a-t-on vraiment évalué toutes les conséquences? Car en plus des risques physiques, il y a aussi les risques psychologiques, aussi dommageables et, sans doute, plus probables. Et, dans quelques années, comment vivrons-nous les séquelles sociales de ces gestes? Comment ces femmes qui ont abandonné leur enfant entre les mains d’étrangers assumeront-elles cette séparation à long terme? Et comment, en grandissant, les enfants vivront-ils cette séparation de leur mère biologique? Quelle pression cela fera-t-il subir au couple adoptif? Les conséquences psychosociales de ces choix de société actuels pourraient finalement être énormes, mais elles sont pour l’instant méconnues, mal documentées et simplement inquiétantes.

Il arrive souvent à l’homme de vouloir jouer les apprentis-sorciers. Et il lui arrive très souvent de le regretter. À force de vouloir intervenir dans l’ordre naturel des choses, que ce soit en matière d’environnement, de biologie ou d’organisation sociale, il peut poser des gestes aux conséquences mal comprises qui pèseront éventuellement lourd sur les générations à venir et, peut-être, sur leurs chances de survie. Avant de permettre, ou d’interdire, de laisser faire ou d’intervenir, il faut prendre le temps de réfléchir, tout le temps nécessaire. La précipitation n’a pas sa place quand notre destin collectif est en cause. Et quand il est question du commerce des bébés, il me semble que ce soit le cas.

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